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dimanche 14 octobre 2012

Les grandes inventions




Un vers, ça va, trop d'vers, bonjour les dégâts. J'ai peur de vous lasser, et vous propose de vous reproser, si vous me pardonnez ce néologisme. Dans une collection qui pourrait s'appeler "Les Grandes Inventions Qu'On Ne Voit Pas Que Ça En Est Parce Qu'On Les Utilise Tous Les Jours", je vous offre une vision nouvelle de :
L’histoire de la plume d'oie.

Certaines personnes pensent que, jusqu'à un passé récent, les gens écrivaient à l'aide de plumes d'oie taillées. Ce n'est pas entièrement faux. Les éleveurs d'oies, enfin, ceux qui savaient écrire, pratiquaient en effet ainsi. Il convient néanmoins de reconnaître qu'il y avait assez peu d'éleveurs d'oies. Les éleveurs de canards, de poules, de dindons, de pintades et de lapins étaient quand même beaucoup plus nombreux, et utilisaient, naturellement, les plumes issues de leur élevage, avec plus ou moins de bonheur, surtout pour les lapins. C'est vrai, pourquoi s'embêter à aller plumer une oie, animal fort agressif, quand on a d'autres plumes sous la main. Et quand on dit des plumes... Les médecins, par exemple, utilisaient les pattes des mouches qui s'aventuraient sur les plaies purulentes de leurs patients, ce qui explique la qualité très moyenne de leur calligraphie. (Essayez d'écrire avec de tels outils, et vous vous moquerez moins d'eux) Or donc, si les plumes d'oies étaient minoritaires, d'où vient le fait que c'est leur nom qui s'est imposé en ce domaine au lieu de celui de la plume de poule, pourtant beaucoup plus commune ? Hein ? Parce que la noblesse utilisait des plumes d'oie dites-vous. Que nenni, que nenni. La noblesse utilisait des plumes de cygnes, des plumes de paon, et plus souvent encore des secrétaires ! Et toc. L'explication est plus simple, et vient d'une déformation orthographique qui date du dix-septième siècle. Pendant que Blaise Pascal inventait la première machine à calculer, son frère Jean, plus littéraire, mais pas plus bête pour autant, inventait la première machine à écrire, qui utilisait des lettres sculptées en relief et à l'envers sur des cubes de pommes de terre, reliées à une sorte de clavier de piano. Bon je vous passe les détails techniques. Il nomma son invention plume-machine, et désigna, en opposition, l'utilisation de la plume traditionnelle par l'appellation plume-doigt. Son invention, grosse consommatrice de pommes de terre, fut assez vite oubliée, mais le terme plume-doigt est resté, en subissant toutefois la mutation que l'on connaît....
En ce qui me concerne, J'utilise plusieurs outils pour écrire. Je ne rédige en anglais qu'avec une plum-pudding, parfaitement adaptée aux vœux de fin d'année, et qui forme très bien les accents.
Plusieurs expressions nous viennent de l'époque où tout était écrit à la plume. C'est ainsi, par exemple, que l'on disait d'un contribuable qui venait de passer quelques heures chez le percepteur à se faire notifier par écrit le montant de son redressement qu'il s'était fait plumer. De même, quand on dit d'un cadre supérieur ou d'un patron qu'il est déplumé, c'est parce qu'il n'écrit plus lui-même, mais fait accomplir ces travaux par des subalternes. Reste à régler le cas de l'expression surannée "se faire tailler une plume". J'apprendrais aux prudes qu'elle signifie, pour un homme, "obtenir une gâterie buccale". D'où cela vient-il ? C'est assez simple. Dans ces temps que les moins de cinquante ans ne peuvent pas connaître, sauf à avoir de saines lectures, les messieurs comme il faut ne demandaient pas ce genre de service à leur épouse légitime. Ils avaient recours soit à des professionnelles, soit à des demi-mondaines. Mais comme il eut été malséant d'annoncer à la cantonade, sur les coups de cinq heures de l'après-midi, "à tout à l'heure, je vais aux putes", les messieurs comme il faut faisaient mine d'avoir cassé leur plume, et d'être contraints d'aller à la maison de la presse du coin pour s'en faire tailler une nouvelle. On notera d'ailleurs que la plume constitue encore l'enseigne des maisons de la presse, même si, de nos jours, les épouses se chargent généralement de faire le boulot, vu qu'avec la crise, il n'y a pas de petites économies. On notera également que, dans certaines régions de France où l'on ne savait pas écrire, les hommes avaient trouvé un autre subterfuge, et prétendaient avoir cassé leur pipe pour sortir d'en faire tailler une. Il se trouve que, dans ces contrées reculées, les femmes sont aussi vindicatives que futées. Elles ont rapidement éventé le stratagème, ce qui explique pourquoi l'expression "casser sa pipe" a pris la funeste signification que nous lui connaissons aujourd'hui.
Cette explication n'est peut être pas complètement et absolument véridique, je vous l'accorde. Mais je la trouve taillée sur mesure pour cet opuscule.

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