Le problème, avec l'étude d’œuvre, c'est que, même en la massacrant de la sorte, ça reste un peu longuet. Je vais mets le reste en une seule fois, et demain, on revient à du plus court... Quoique...
Acte III, scène 1 : Juan en
fringues de base – Sganarelle en médecin
Sganarelle,
qui craignait pour sa vie à l'idée d'être confondu avec Juan, a trouvé une
alternative sous la forme de bons déguisements pour son maître, habillé en
homme du peuple, et pour lui, qui s'est costumé en toubib. Ils cheminent
ensemble et, comme l'habit peut parfois faire en partie le moine, Sganarelle,
qui se sent brutalement intelligent sous le chapeau pointu, entreprend de
discuter avec Juan de l'existence de Dieu. Lui, bien entendu, y croit, et
l'autre pas. Mais il a beau faire, il ne réussit pas à convaincre le mécréant,
et ils finissent tous deux par se perdre dans la forêt qu'ils traversent. Un
mec passe, ils l'interpellent. Comme c'est un Gars Pauvre et Sincère, ils
espèrent qu'il va les aider à retrouver leur route.
Bon, nous avons là une
première charge, traditionnelle chez les auteurs du Molière, contre la médecine
de l'époque, suivie d'une démonstration de Sganarelle sur l'existence de Dieu,
assez peu convaincante, il faut l'avouer. Cette scène est toutefois à l'origine
du poème "La Rose et le Réséda", de Louis Aragon, qui parle de
"celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas", et qui peut
aussi tomber au bac (mais je ne vous ai rien dit). Par ailleurs, il se trouve
que cette scène serait également à l'origine des contes du Petit Chaperon Rouge
et du Petit Poucet, qui se perdent dans la forêt, mais là, c'est pas si sûr, vu
que le costume de médecin est noir, et pas rouge, et que Poucet et ses frères
étaient sept, et pas deux. Mais quand même, ils se perdent dans la forêt.
Acte III, scène 2 : Juan–
Sganarelle – Le Gars Pauvre et Sincère
Le
pauvre indique leur chemin à Juan et Sganarelle. Une fois ce problème réglé, on
replonge dans une discussion sur l'existence de Dieu. Le pauvre, qui n'a rien à
se mettre sur le dos, prie Dieu à longueur de journée, mais cela reste comme
lui, sans effets. Il se refuse toutefois à jurer, même pour obtenir le louis
d'or que Juan lui promet, et finit par lui donner néanmoins. Les auteurs
pratiquent ensuite le teasing de manière toujours aussi maladroite, en
annonçant qu'un mec est en train de se faire tabasser par une force trois fois
supérieure en nombre, ce que Juan ne saurait tolérer.
On vérifie d'abord que le
Gars Pauvre et Sincère, communément appelé GPS, est une solution fiable pour
retrouver son chemin. Puis on retrouve la problématique sur l'existence de
Dieu, à croire que c'est le thème de la pièce ! Le moins que l'on puisse dire,
c'est que les auteurs se dispersent. Dom Juan est avant tout une histoire de
sexe, mince ! La fin de la scène nous apprend que, contrairement à ce que l'on
avait compris à la scène 5 de l'acte II, Juan est plutôt généreux, et assez
couillu comme mec. A mon avis, il y a eu changement d'auteur entre les deux
scènes…
Acte III, scène 3 : Juan –
Carlos – Sganarelle
Juan
met en fuite les trois larrons, et sauve ainsi la vie de Carlos, qui ne le
connaît pas personnellement, mais le remercie et se déclare son débiteur. Ledit
Carlos explique ensuite que, frère d'Elvire, c'est en cherchant ce gros
malfaisant de Juan pour venger l'honneur de la famille qu'il a été séparé de sa
troupe. Juan, qui ne sait pas ne pas mentir, lui raconte que le fameux Juan est
un ami à lui, et qu'il va organiser un rendez-vous pour qu'une discussion
puisse avoir lieu, afin d'éclaircir la situation. Carlos est vachement gêné du
coup. Son sauveur est le pote de son ennemi, dur dur dur (lala) !
On a le droit à une
considération sur le sens de l'honneur caractéristique de la noblesse, à
laquelle appartiennent, je le rappelle, Juan, Carlos, et l'ensemble des
spectateurs de la pièce. C'est de la lèche de première bourre, et puis c'est
tout !
Acte III, scène 4 : Juan –
Carlos –Alose - Sganarelle
Alose,
qui est le frère de Carlos, débarque, et reconnaît Juan. Il faut croire qu'il
était au mariage de sa sœur, lui ! Du coup, il veut le trucider immédiatement,
mais Carlos s'interpose, en expliquant qu'il doit la vie à Juan. Alose réplique
qu'il n'en a rien à foutre, vu que la vie, c'est que du pipi de chat à côté de
l'honneur. Carlos l'admet, mais quand même, faut respecter le pipi de chat un
minimum. Il décide de décaler l'exécution d'une journée, histoire de permettre
à Juan de se repentir un petit peu. Juan répond banco, et confirme qu'il n'en
profitera pas pour filer à l'anglaise, ce qui est très mal vu pour un espagnol.
Alose est vachement en pétard, mais cède.
La lecture de cette scène
nous explique clairement pourquoi la noblesse a quasiment disparu de nos jours.
Préférer l'honneur à la vie, ça conduit à faire plein de conneries, du style
"Moi ! Mettre une capote ! Jamais ! La Noblesse ne baise pas sous
emballage plastique !", ou encore "Moi, attendre le feu vert et
traverser dans les clous ! Que nenni, Noblesse va où et quand elle désire
!" ou bien "Moi, boucler ma ceinture ! Jamais ! Je ne porte que des
bretelles ! C'est plus seyant." Eux appellent ça le sens de l'honneur, et
nous des comportements à risques.
Acte III, scène 5 : Juan –
Sganarelle
On
apprend que pendant la prise de bec entre Juan et ses beaufs, Carlos et Alose,
Sganarelle s'était planqué comme un rat, ce qui irrite un peu le boss. Il
informe néanmoins son valet que l'homme qu'il a sauvé se trouve être à la fois
le frère de sa meuf et son assassin en puissance. Le brave Sganarelle, dont le
but dans la vie semble être d'éviter les ennuis, conseille à Juan de réintégrer
le domicile conjugal, et de faire amende honorable, afin d'éviter les emmerdes,
mais pour l'autre, cette hypothèse relève de l'impossible. Une femme consommée
n'est bonne qu'à jeter, il ne s'imagine pas en mari, emprisonné par les
"liens" sacrés du mariage. En discutant, ils parviennent à un
monument funéraire élevé à la gloire du Commandeur naguère tué par Juan.
Celui-ci s'étonne que feu l'homme raisonnable ait fait édifier, pour sa
dépouille, une aussi luxueuse sépulture, surmontée d'une magnifique statue.
Invitant celle-ci à diner, par bravade, Sganarelle, puis Juan, la voient
acquiescer d'un hochement de tête. Ils préfèrent se carapater…
Dans la première partie, il
se confirme que Juan est ce que l'on pourrait appeler un décapsuleur
fondamental. A part les berlingots neufs, il n'y a pas grand-chose qui
l'intéresse. D'ailleurs, si l'on en croit Gainsbourg, auteur et compositeur
classique du XXème siècle, bientôt au programme de terminale littéraire et
œnologique, on surnommait Juan "le poinçonneur des Lilas", vu que les
lilas, ce sont des fleurs blanches, et que la blancheur, c'est le symbole de la
virginité. C'est quoi la virginité ? Bof, de nos jours, c'est surtout la
caractéristique d'une espèce de vigne qui ne donne pas de raisin. La deuxième
partie, avec la statue qui bouge pour accepter une invitation à diner, est
autrement complexe à analyser. Un ecclésiastique, qui, bourré de troubles
obsessionnels compulsifs, va tiquant, pense qu'est ici évoquée la présence
divine. Un autre critique, d'origine russe, un certain Dostoïevski, prétend
qu'il s'agit de la mauvaise conscience de l'assassin qui le travaille, appelant
pour son crime un châtiment… A mon avis, et je le partage, cette scène a plus
banalement été écrite le troisième jeudi de novembre 1682, par des auteurs qui
avaient fêté par anticipation la fin de l'acte III au beaujolais nouveau, même
que c'est La Fontaine qui fournissait le liquide ! La preuve, l'acte IV
commence au même moment et au même endroit ! C'est donc la suite de la même
scène, il n'y avait aucune raison de faire là une coupure. Quoi ? Pour changer
les chandelles ? Rien n'empêchait d'en mettre de plus longues au départ !
Acte IV, scène 1 : Juan–
Sganarelle
Très
courte scène durant laquelle Juan nie le mouvement de tête de la statue du
Commandeur, et interdit à Sganarelle d'en reparler.
Le commentaire sera bref.
Dessaoulés, le lendemain matin, les auteurs décident de renier, par cette
courte scène, leurs élucubrations de la veille, sans pour autant gaspiller leur
temps, leur encre et leur parchemin à réécrire la fin de l'acte précédent.
D'autant que les chandelles ont été changées, et le boulot payé par le
commanditaire.
Acte IV, scène 2 : Juan –
Sganarelle – La Violette
La
scène 2 est aussi courte que la première. On y apprend que monsieur Dimanche,
le marchand à qui Juan doit de l'argent, vient réclamer son dû, et que Juan a
décidé de le recevoir et de l'embobiner.
Cette scène, comme la
précédente, est une conséquence de la biture de la fin du troisième acte. La
première scène mettait un point final à l'acte précédent, celle-ci constitue
une introduction à l'action qui va suivre, et qui est fondée sur la promesse
que fait Juan d'envoyer paître le bourgeois, ce qui constitue un gros clin d'œil
bien gras à l'assemblée des nobles, qui méprise bien évidemment la bourgeoisie…
Acte IV, scène 3 : Juan –
Sganarelle – Dimanche
Comme
prévu, Juan fait tourner le pauvre marchand en bourrique, en utilisant la
méthode décrite par la Fontaine dans "le Corbeau et le Renard" : tout
flatteur vit aux dépends…
C'est long, c'est lourd,
c'est redondant, mais vu que c'est un noble qui se moque d'un bourgeois, ça
fait marrer les nobles, ce qui était le but revendiqué. C'est pas joli, joli,
mais c'est efficace. De là à parler de culture… Disons que c'est un sketch d'un
comique à la mode.
Acte IV, scène 4 : Louis -
Juan – Sganarelle – La Violette
Monologue
courroucé de Louis, père de Juan, qui déplore la conduite de son fils, qui fait
son malheur et dont il ne peut être fier. Il lui explique qu'on est noble dans
ses actions plus que dans sa naissance, et que le fait d'être bien né oblige à
se conduire en gentilhomme, ce qui n'est pas le cas de Juan, qui constitue, à
lui tout seul, la honte de la noblesse du pays tout entier. Il termine sa
tirade par une lourde menace et enjoint son fils de craindre la punition
paternelle. Juan essaie timidement de l'amadouer, sans succès.
Quelle engueulade ! Pour être
en pétard, il est en pétard, le paternel ! Mais bon, ce n'est guère que l'expression
excessive, puisque théâtrale, du fossé des générations. Le vieux Louis ne peut
comprendre le comportement de son fils, la perte de valeur qu'il suppose, vu
que, justement, il est vieux, et donc rangé des affaires. C'est sûr, un vieux
Louis ne vaut pas un Napoléon neuf. En même temps, chez les Bonaparte, on a
jamais dépassé trois, alors… En fait, le vieux Louis a juste oublié que, du
temps de sa jeunesse, lui aussi à profité du droit de cuissage alors en
vigueur. Ce qu'il reproche à son fils, fondamentalement, ce n'est pas tant de
tirer tout ce qui porte jupon, c'est de promettre le mariage pour y parvenir. De
son point de vue, c'est de la triche, une forme de dopage moral… C'est pas
sport !
Acte IV, scène 5 : Juan –
Sganarelle
Une
fois son père parti, Juan souhaite sa mort, en trouvant injuste que les parents
osent vivre encore quand leurs enfants sont adultes. Sganarelle essaie bien de
morigéner l'outrecuidant (cherchez un peu dans le dictionnaire), mais, pleutre
à son habitude, retourne sa veste dès que Juan devient menaçant.
Nulle part, les auteurs ne
nous précisent l'âge de Juan, mais on peut quand même supposer, à sa technique
amoureuse éprouvée, et à son appétit insatiable, qu'il a dans les vingt-cinq
ans, à un poil de cul près, non ? Alors, franchement, sa réaction
d'adolescent pré pubère, prêt à faire pipe par terre et à se rouler dedans,
relève, pour le moins, de la maladresse d'écriture. Quand on sait qu'ils se
sont mis à plusieurs…C'est pas que ce soit mauvais, mais c'est faible, pour un
classique. On dirait du Franck Dubosc.
Acte IV, scène 6 : Juan –
Elvire – Ragotin - Sganarelle
Elvire,
sur le chemin du pardon, de la rédemption, et du retour au couvent, vient
supplier Juan de s'amender, au nom de l'amour et de la tendresse qu'elle a éprouvés
pour lui, car elle craint que les représailles divines ne s'exercent de manière
cruelle à son encontre. Juan ne semble pas inquiet quant à cette hypothèse,
mais tente de retenir son ex près de lui pour la nuit, sans succès néanmoins.
On l'a connue tigresse, au
début de la pièce, la voici dans toute la splendeur de son instinct maternel
pour le mauvais garçon qu'elle a aimé si fort. C'est y pas attendrissant comme
un marteau de boucher ? Elles sont quand même pas croyables, les meufs, quand
il s'agit de nous faire craquer. Les vannes les plus vaseuses sont de sortie,
comme cette histoire de colère du ciel. Si la météo était vraiment liée aux
histoires de culs, il y aurait plus d'orages sur Saint Trop' que sur les
sommets des Alpes, non ? Bon, alors…
Acte IV, scène 7 : Juan –
Sganarelle
Juan
concède à Sganarelle que le passage d'Elvire l'a ému. Non pas qu'il se soit
senti concerné par la menace de représailles célestes, mais il confie qu'il
l'aurait bien sautée encore une fois, mais en termes du dix-septième siècle…
Mais, justement, il est temps de passer à table. Il invite Sganarelle à diner
avec lui, quand on frappe à la porte…
Franchement, quel bon vivant
que ce Juan. Il ne pense qu'à baiser et à bouffer ! Je l'apprécie de plus en
plus. Et pas fier avec ça, puisqu'il invite son valet à sa table. A l'époque,
c'était loin d'être habituel. Quant aux auteurs… Toujours les mêmes ficelles
grossières. On frappe à la porte, Sganarelle va ouvrir en cachant l'arrivant,
et… C'est la fin de la scène. C'est vraiment du suspense à deux balles ! On se
croirait dans une série américaine. Pire, une allemande !
Acte IV, scène 8 : Juan –
Sganarelle – La statue
Et
revoilà la statue, qui vient honorer son invitation à diner. Sganarelle, en bon
chocotard, a manifestement une trouille bleue, tandis que Juan, hyper cool,
demande qu'on rajoute un couvert. Son attitude ne plait pas à la statue, qui le
met au défi de venir souper avec elle le lendemain soir. Juan accepte.
Vous noterez qu'on arrive,
une fois de plus, à la fin de l'acte, et que, comme au précédent, tout dérape
dans le surnaturel et l'absurde le plus total. Même explication que
précédemment, qui nous éclaire sur la méthode de travail du groupe. Biture à
chaque fin d'acte. De mon point de vue, ils devaient toucher leur pognon par
tranches successives, au fur et à mesure de la livraison des actes entiers, et
en profiter pour passer les commandes. Je ne vois pas d'autre explication.
Acte V, scène 1 : Louis -
Juan– Sganarelle
Dialogue
entre le père, ému, et le fils, hypocrite. Ce dernier prétend avoir compris
combien son comportement était contraire à la morale et aux bonnes mœurs, et
affirme vouloir s'amender. Le père, encore beau, ne se sent plus de joie, et,
pour montrer sa belle foi, il ouvre grand ses ailes et fonce annoncer la bonne
nouvelle à sa femme, qui, unique, se trouve par conséquent être la mère de
l'infâme.
Deux éléments importants dans
cette scène : premièrement, Juan change de stratégie, et décide de devenir le
roi des hypocrites, pour continuer à draguer comme un malade, mais en douce, et
sans se faire emmerder. Deuxièmement, on notera la toute petite place laissée à
la mère de Juan dans cette histoire : à peine une mention… D'ici à penser que
cette pièce serait un tantisoit sexiste…
Acte V, scène 2 : Juan–
Sganarelle
Sganarelle,
qui n'a pas compris la duplicité de son maitre, le félicite pour son changement
d'attitude. Juan, qui ne désire pas le laisser baigner dans sa sottise, lui
explique, par une longue tirade, toutes les subtilités de son plan, en se
référant aux us et coutumes des gens de son époque, dont il vante à la fois
l'hypocrisie et l'efficacité. Sganarelle, effaré, essaie de convaincre son
patron qu'il a tort. Il utilise, pour se faire, une dialectique pour le moins
hermétique, dont Juan se moque comme de sa première capote.
L'explication est fournie
plus pour le public que pour le valet, ce qui prouve combien les intellectuels
prenaient les nobles pour des cons. Quant à la diatribe de Sganarelle, elle est
censée nous démontrer que les domestiques ne sont guère doués pour la logique.
Cependant, elle est tellement maladroite et infondée, qu'elle explique aussi
pourquoi les littéraires ne vont pas en section scientifique. En fait, la
logique littéraire est comparable à la logique féminine. Elle est
fondamentalement réservée à un public averti, préalablement acquis à sa cause.
Acte V, scène 3 : Carlos -
Juan– Sganarelle
Voici
que paraît Carlos, le frère d'Elvire, qui se sent redevable envers Juan, son
sauveur, et qui aimerait bien lui sauver les bidons. Il tente donc une nouvelle
fois de le convaincre de réintégrer le domicile conjugal, en quel cas tout le
monde fermerait les yeux sur ses petites incartades passées. Mais comme il l'a
fait avec son père, Juan lui joue l'hypocrite comédie du repentir, et prétend
vouloir se retirer du monde, tout comme Elvire, d'ailleurs, qu'il ne saurait
contraindre à quitter le couvent une nouvelle fois. Carlos lui répond que,
puisque c'est comme ça, il va voir sa gueule à la récré. Juan rétorque que même
pas peur, et lui donne rendez-vous pour une baston à la sortie.
Après les deux scènes
précédentes, on pouvait penser que Juan allait faire profil bas pour avoir la
paix, et être plus discret dans la gestion de ses histoires de fesses. Du coup,
la proposition du brave Carlos, qui essaie d'arranger tout le monde, nous
paraît plutôt sympa, et on pense, bêtement, que Juan va sauter sur l'occasion.
Et ben non ! Il l'envoie se faire voir ! Pas facile à comprendre, le Juan, pas
vrai ? C'est que vous oubliez qu'ils se sont mis à plusieurs pour l'écrire, et
que c'était chacun son tour… Du coup, la logique du personnage est forcément
fluctuante, et la situation se complique. On pressent déjà qu'ils vont être
obligés de biaiser pour s'en sortir.
Acte V, scène 4 : Juan–
Sganarelle
Le
pauvre Sganarelle ne comprend plus rien à l'attitude de son maître, dont il
préférait la précédente personnalité. Il pense que le ciel, ce coup-ci, va se
fâcher très fort. Juan en rigole. Sganarelle, apeuré, voit alors apparaître un
spectre, qui ne peut qu'être un message du ciel. Juan demande que le ciel soit
plus clair dans sa façon de communiquer.
Toute petite scène, à peine
une demi-page, où on nous balance un spectre, mine de rien. Quand je vous
disais qu'ils commençaient à patauger grave, les auteurs…
Acte V, scène 5 : Le spectre
- Juan– Sganarelle
Le
spectre, de sexe féminin, est effectivement envoyé par le ciel pour donner à
Juan une dernière chance de se repentir vraiment. Mais, fidèle à son mauvais
caractère, Juan l'envoie se faire voir. Le spectre change d'aspect, pour
devenir plus terrifiant, mais Juan n'est pas impressionné.
C'est encore une toute petite
scène. On sent que les auteurs s'essoufflent. Le rythme s'accélère, ça sent
l'écurie…
Acte V, scène 6 : La statue -
Juan– Sganarelle
La
statue réapparaît juste à ce moment là, et rappelle à Juan sa promesse de venir
diner. L'autre, qui se la pête un max, dit banco, et disparaît alors à la fois
dans d'atroces douleurs et la terre qui s'ouvre sous ses pieds avec de grandes
flammes. Sganarelle reste tout seul, et se lamente d'avoir perdu son CDI.
Quand je prétendais qu'ils ne
savaient plus comment s'en sortir, de leur scénario à la mords-moi le nœud…
Bonjour le final ! Allez Juan, t'a trop tiré à tort et à travers, tu files
directement en enfer, sans passer par la case départ et sans toucher 20 000 !
Les mecs qui ont écrit ça auraient vécu à la fin du vingtième siècle, ils
auraient essayé de nous convaincre que le SIDA avait été envoyé par Dieu pour
punir les baiseurs. Mais c'est pas vrai, parce que, de deux choses l'une, soit
Dieu n'existe pas, et on peu s'aimer sans arrière pensée de péché, soit il
existe, et on se souvient alors qu'il a dit "baisez-vous les uns les
autres", et on remarque qu'il n'y a, dans ce commandement, aucune
précision de nombre ni de sexe. Ce qui semble logique, d'ailleurs, et les
bonobos, qui sont souvent plus proches de Dieu que les humains, l'ont bien
compris, eux qui copulent frénétiquement dès qu'il y a risque de conflit dans
la troupe : un mec qui baise ne pense à rien d'autre, et surtout pas à
trucider son prochain ! Alors, il va peut-être nous lâcher la grappe,
maintenant, le Molière, et se contenter de nous pondre des petites comédies
rigolotes sur la bourgeoisie. Flûte !
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