Puisque nous avons attaqué le registre coquin, je vous propose une autre parodie de
poème. En cette matière, je ne saurais que trop vous conseiller, pour profiter à fond, de relire le poème d'origine, si vous ne le connaissez pas. Nous changeons complètement d'époque pour nous intéresser à la deuxième
partie du vingtième siècle, et à un génie nommé Prévert. Si j'osais une image
mercantile, je dirais que Prévert, c'est un peu l'épicier arabe du quartier. On
trouve de tout chez lui, du rire et des larmes, provoqués sans fioritures, avec
des mots simples. De mon petit point de vue, on trouve aussi beaucoup de
foutage de gueule, si vous me pardonnez l'expression. On aura d'ailleurs
l'occasion d'en reparler plus loin. Il a en effet eu le droit à plusieurs
pastiches. Le premier que je vous propose maintenant s'appelle :
Pour faire le portrait d'un oiseau
(il s'agit d'un premier geai)
Peindre
d'abord un pantalon
Avec
une braguette ouverte
Et
sur le tissu des carreaux
Peindre
ensuite
Un
caleçon à pois
Un
molleton
Un
kangourou
Une
ficelle
Ou
rien du tout
Qui
garde bien au chaud
Pour
l'oiseau
Placer
ensuite la toile contre un arbre
Ou
un poteau
Une
vespasienne
Une
demoiselle parisienne
Se
cacher dans le décor
Sans
faire de bruit
Sans
faire de geste…
Si
le pantalon est adulte
Et
pas trop vieux
L'oiseau
arrive vite
Si
la culotte est petite
Il
peut aussi mettre plusieurs années
Avant
de pointer son nez
Ne
pas se décourager
Attendre
Attendre
s'il le faut pendant des années
En
évitant les orgelets
La
taille et la vitesse de développement de l'oiseau
N'ayant
aucune influence
Sur
sa capacité
Quand
l'oiseau se présente
Éviter
de le tripoter
Ça
ferait tache dans le tableau
Attendre
qu'il pénètre
Fermer
doucement la braguette
En
prenant soin de ne pas coincer le pinceau
Puis
Effacer
un à un les carreaux
Et
le tissu qui les supporte
Sans
toucher à l'oiseau
Faire
ensuite le portrait d'une dame
Ou
d'un jeune homme c'est selon
Peindre
le velouté de leur peau
La
tendresse dans leur regard
Et
attendre que l'oiseau se hausse du col
Pour
voir
S'il
ne monte pas c'est inquiétant
Mais
s'il se dresse
C'est
bon signe
C'est
que le tableau lui plaît
Que
la vie peut continuer
Vous
pouvez arrêter de peindre
Et
dire merci à Pierre Perret
Honnêtement,
je crois que c'est celui que je préfère. J'ai même la faiblesse (ou l'outrecuidance)
de penser que peut être, de là-haut, s'il nous regarde, le vieux Jacques
pourrait en sourire… Et je vous souhaite une bonne journée...
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